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Enigma: un exemplaire exposé à Montormel

Publie le 24/07/2015

                                                   

En ce début d’année sortait le film « Imitation Game » qui raconte l’histoire d’Alan Turing, mathématicien et cryptologue, chargé par le gouvernement Britannique de percer le secret de la célèbre machine de cryptage allemande Enigma.

Le Mémorial de Montormel présente dans sa collection une machine Enigma provenant du champ de bataille et destinée à l’armée de terre allemande. Elle a été retrouvée au début des années 1980 près de la Dives sur la commune du Bas d’Aubry, non loin du pont de Saint Lambert. Afin d’éviter qu’elle ne tombe dans les mains des alliés et n’ayant plus la possibilité de la détruire, cette pièce ultra secrète et sensible a été dissimulée dans un tronc d’arbre. On peut imaginer que c’est à la toute fin de la bataille, alors que les redditions devenaient massives, que cela s’est produit.

C’est dans ce tronc d’arbre que l’exemplaire présenté va rester caché jusqu'à ce que l’arbre ne soit brûlé : la machine à coder fut alors retrouvée parmi les cendres. Plus récemment, une boite servant à ranger les rotors a été retrouvée non loin de là. Elle fait vraisemblablement partie du même ensemble.

Plusieurs autres Enigma ou éléments de machines brisées ont été découverts sur le champ de bataille de la poche de Falaise-Chambois. La perte de ces machines précieuses illustre bien l’ampleur de la défaite allemande en Normandie, chaque division étant équipée d’un exemplaire. L’Enigma exposée au Mémorial appartenait vraisemblablement à l’une des nombreuses divisions encerclées dans la poche. Le collectionneur qui l’a mise en dépôt au mémorial pense que ce pourrait être celle de la 10ème division SS Frundsberg dont le PC était stationné non loin de là.

Rappel historique :

                                                   

C’est en 1923 qu’est commercialisée la première machine qu’Arthur Scherbius, un ingénieur allemand, a mis au point. Appelé Enigma et destiné au marché public, l’appareil s’avère être un échec commercial, principalement en raison de son prix exorbitant. 

C’est la Marine allemande qui va permettre le succès d’Enigma, en  l’adoptant en 1926. L'appareil est ensuite repris par l'armée de terre allemande en 1929. À partir de ce moment, son usage est étendu à toutes les forces armées allemandes et une grande partie de la hiérarchie nazie. Améliorée et modifiée, elle va être utilisée par l’armée allemande tout au long de la seconde guerre mondiale pour crypter les messages. Les versions destinées à la marine de guerre allemande et à la diplomatie furent les plus sophistiquées.

Réputée inviolable, Enigma avait dès le début des années 1930 mobilisé l’attention des experts des services de renseignements Français, Anglais, et Polonais. En 1932, Marian Rejewski, Jerzy Rozycki et Henryk Zygalski du bureau du chiffre (Biuro Szyfrów) du renseignement militaire polonais parviennent à percer en partie le fonctionnement de la machine. Ils parvinrent à construire Bomba, une machine capable de décrypter les messages envoyés par Enigma. Juste avant 1939, les Polonais parvinrent à partager leurs découvertes avec les services de renseignement français et britannique. 

Les Allemands améliorèrent le fonctionnement d’Enigma tout au long de la guerre. C’est ces dernières versions qu’Alan Turing va parvenir à décoder en 1942. Baptisé ULTRA, le décryptage des différentes machines va donner un avantage décisif aux alliés…

 

Stéphane Jonot, 2015