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Une machine à chiffrer Enigma au Mémorial de Montormel

Publie le 03/07/2019

Une Enigma au Mémorial de Montormel

Déjà présentée en 2015, cette Enigma découverte au Bas d’Aubry dans les années 1980 est de retour au Mémorial de Montormel. La machine, qui fut sauvée par l’œil averti d’un colonel de l’armée néerlandaise, appartenait à la célèbre collection Bertrand Paris qui regroupe un grand nombre de pièces historiques de la bataille de Normandie.

Elle fut mise à prix dans une vente aux enchères, événement qui a eu lieu fin avril 2019 à Caen. Elle a été acquise à titre privé par Stéphane Jonot, directeur du Mémorial de Montormel, et placée en dépôt au mémorial de Montormel afin d’être vue par le plus grand nombre.

La machine Enigma présentée provient donc du territoire de la commune d’Aubry-en-Exmes, où elle fut dénichée non loin du pont de Saint Lambert. Cette pièce ultra secrète et par définition sensible avait été dissimulée dans un tronc d’arbre afin d’éviter qu’elle ne tombe dans les mains des alliés. On peut imaginer que c’est à la toute fin de la bataille, alors que les redditions devenaient massives, que cela s’est produit.

Elle va rester cachée dans ce tronc jusqu'à ce que l’arbre ne soit brûlé, et c’est ainsi qu’elle fut retrouvée parmi les cendres. Il y a peu, une boite servant à ranger les rotors a été retrouvée non loin de là. Elle fait vraisemblablement partie du même ensemble. Plusieurs Enigma ou éléments de machines brisées ont été découverts sur le champ de bataille de la poche de Falaise Chambois.

La perte de ces machines précieuses illustre bien l’ampleur la défaite allemande en Normandie. La version exposée au mémorial était destinée à l’armée de terre allemande. Il y en avait un exemplaire attribué par division. Elle appartenait vraisemblablement à l’une des nombreuses unités encerclées dans la poche. Elle pourrait par exemple être celle de la 10e division blindée SS Frundsberg dont le PC était stationné non loin de là.

La machine Enigma

Enigma était une machine électromécanique portable servant au chiffrement et au déchiffrement de messages. Elle fut inventée par l'Allemand Arthur Scherbius et fut utilisée principalement par les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale.

Le système de chiffrage était réputé inviolable. Néanmoins, dès 1931, le Service français de renseignement (le « 2e Bureau ») parvint à recruter une source au sein du ministère de la Reichswehr. Il obtint de lui de premières copies de la documentation et les proposa aux services de renseignement polonais du Biuro Szyfrów, service polonais du chiffre.

Les officiers polonais obtiennent dès 1933 de premiers résultats concluants. Le mathématicien Marian Rejewski, assisté de Jerzy Rozycki et Henryk Zygalski, parvient à reproduire le fonctionnement de la machine. Cinq ans après, ils conçoivent des engins électromécaniques, les « bombes », qui automatisent le processus.

En août 1939, les Français lancent secrètement la fabrication d'une série de 40 machines Enigma pour capter les messages allemands, sur la base de celles obtenues de Pologne. En parallèle, le Service de renseignement français invita les Britanniques (notamment Dilly Knox et Alan Turing) pour leur faire partager les informations franco-polonaises. Puis, afin d'améliorer l'efficacité de leur travail, les Alliés décidèrent de centraliser tous les éléments connus sur les déchiffrages d'Enigma à Bletchley Park.

Pendant le second conflit mondial, les cryptanalystes britanniques purent continuer les travaux du polonais Marian Rejewski. Ils furent par la suite capables de déchiffrer les messages en perfectionnant les « bombes électromécaniques » de celui-ci.

Les informations obtenues donnèrent au camp Allié un avantage certain au cours de la guerre.

 

Stéphane Jonot